• QLF Qué la familha !

          (post publié le 24 octobre et complété le 1er novembre)

     

    Nous avons regardé Familha(s) : 5 petits films documentaires passionnants, composés d’entretiens réalisés par Guilhem Boucher (musicien, collecteur, animateur de l'association La Granja sise à Soulomès dans le Lot) avec des acteurices des scènes musicales occitanes actuelles.

     

    QLF Qué la familha !

     

    5 petits films intitulés : « Nàisser / Naître », « Aprene / Apprendre », « Tornar / Revenir », « Posar / Puiser » et « Alandar / Ouvrir les ailes ». Sur le rôle de la famille dans la transmission de la culture locale. Sur le rôle de la musique dans la transmission de la langue. Sur la place des instruments dans la famille. Sur cette alchimie entre la famille, la langue, les instruments, la musique. Sur le rejet à l'adolescence de tout ça et sur la réappropriation quelques années plus tard...  

    C’est un webdocumentaire sur la transmission. Guilhem Boucher a choisi des interlocuteurices pour qui cette transmission a eu lieu dans le cadre familial. 5 ou 6 d’entre elleux ont eu un père ou un oncle avec une pratique instrumentale. Plusieurs ont entendu parler occitan à la maison (plutôt dans le contexte du renouveau occitaniste des années 1970-1980 dans lequel baignaient leurs parents artistes que dans une généalogie familiale plus ancienne).

    Je me dis que j’aimerais voir un autre film qui donnerait la parole à des musicien·nes occitan·es choisi·es selon d’autres critères : ne pas être né·es dans une famille occitaniste, ne pas avoir été scolarisé·es dans une calandreta, ne pas avoir mis les pieds dans un bal trad ni découvert l'existence de la vielle à roue avant l’âge de 20 ans… Il en existe quelques-un·es (dans le film Clément Gauthier semble un peu comme ça, sa famille lui a certes transmis le goût de la musique mais plutôt la musique baroque, c'est de lui-même qu'il est allé rencontrer - « au culot... poliment au culot », dit-il - des musiciens trad). Comment la transmission, extrafamiliale, a-t-elle eu lieu pour elleux ?

    Parce que là, ça me donne parfois l'étrange impression de voir des dynasties sacrées de saltimbanques ultraminoritaires entretenir dans le plus grand secret les braises de la culture occitane toujours vivante. Une avant-garde politico-culturelle de la révolution anti-jacobine. Meneuse d'un peuple appelé à se soulever à partir des parquets des bals trad, dernier espace populaire non mondialisé, non colonisé (je reviendrai bientôt sur le concept de « colonisation de l'intérieur ») ?

    Enfin, je le reconnais, ce n’est sans doute pas tant ce qui apparait dans les entretiens que les fantasmes que j’y projette (je veux dire que c’est moi qui cherche partout l’espace poétique d’où surgira l’insurrection des consciences. À chacun·e son « insurrection qui vient » !). Depuis notre arrivée ici en Cévennes, j’ai plongé dans la chanson et la musique occitane, dans l’histoire et la littérature occitane, dans la langue occitane… mais je ne suis pas bien sûr de comprendre ce que j’y cherche (à part, de toute façon, le plaisir de chercher).

    Ce sont mes questions à moi. Je cherche dans le film des réponses politiques. Elles n’y sont pas. Il n'y est question que de musique, de culture. À peine de langue (au début je me prépare à porter toute mon attention sur les paroles des interviewé·es en gardant juste un œil « en rappel » sur les sous-titres… mais seule Caroline Dufau tient à s'exprimer en occitan, Guilhem Boucher s’entretient avec les autres en français – ce qui me laisse décontenancé).

    Mais c'est quand même très intéressant. On y entend donc Clément Gauthier (chanteur, joueur de bodega et de cabrette, qui vit en Cévennes) et Caroline Dufau (du groupe vocal Cocanha, de Toulouse). Hervé Capel (accordéoniste en Artense, région d'Auvergne) et Mickaël Vidal (polyinstrumentiste du Quercy). Les frères  Matèu et Tomàs Baudoin (de la famille Artús, de Pau. Cofondateurs du label Pagans dont on avait parlé ici). Aelis Loddo (de La Talvera, dont on avait parlé à la fin de cet article, au milieu de celui-ci et dans celui-là). Et Anaïs Vaillant, qui a eu l’incroyable chance de cotoyer lors de ses études le merveilleux Claude Gaignebet ; Adrienne et moi l’avions rencontrée un matin à l’heure du petit déjeuner, devant une porte d’une ferme occupée, chantant a cappella une version de « Je voudrais être mariée » où « la belle » à la fin ne gagnait pas en mourant le droit de ne plus aller aux champs, comme dans la version chantée par Sylvie Berger que je connaissais, mais finissait « enterrée dans son champ », signe peut-être d’une version protestante – cévenole ?

     

    QLF Qué la familha !

     

    P.S. : Anaïs Vaillant anime une émission/podcast sur Radio Escapades (de Saint-Hippo). Le dernier épisode parle aussi de transmission. De rencontres, de collectage, de re-création… Elle y interviewe la conteuse Malika Verlaguet, et les cantaire·as Maud Herrera et François Dumeaux qui racontent comment ils vont faire « du collectage auprès d’un collecteur », en l’occurrence Pèire Boissièra. Òc ! Pèire Boissièra, à qui j’avais consacré un post admiratif.


  • Commentaires

    Aucun commentaire pour le moment

    Suivre le flux RSS des commentaires


    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :